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Action n°5 - 3 mai 2002 Voter Chirac, et ensuite ? Aucune réponse à nos lettres |
Jacques Chirac a été élu. Beaucoup dentre nous avons voté pour lui. Et ensuite ?
Le gouvernement de droite constitué par Jean-Pierre Raffarin le 7 mai 2002 comprend seulement 6 femmes sur 27 ministres et secrétaires dÉtat, soit 22 %. Parmi elles, 3 sont ministres : Michèle Alliot-Marie (défense), Roselyne Bachelot-Narquin (écologie), et Brigitte Girardin (outre-mer) ; 3 sont secrétaires dÉtat : Tokia Saïfi (développement durable), Dominique Versini (précarité), et Nicole Ameline (mer).
Il ny a pas de ministre, ni même de secrétariat dÉtat, aux droits des femmes. Les services du secrétariat dÉtat précédent seront sans doute rattachés au ministère des Affaires sociales (ministre : François Fillon).
Le Collectif national des droits des femmes, auquel appartient le réseau "Encore féministes !", a réagi en publiant un communiqué et en demandant un ministère des Droits des femmes doté dun budget important.
Pour appuyer cette demande, écrivez au Président de la République !
Voici un canevas :
« Monsieur le Président de la République,
Depuis 1974, tous les gouvernements de la République française ont comporté une ministre ou une secrétaire dÉtat chargée des droits des femmes.
Laction menée doit être poursuivie, car il subsiste encore trop dinégalités, dinjustices, de violences dont les femmes sont spécifiquement victimes. Nous vous demandons donc, avec le Collectif national des droits des femmes, de nommer au plus vite une ministre des Droits des femmes, disposant dun budget important. »
http://www.elysee.fr/ecrire/index.htm
adresse postale (inutile daffranchir) : Palais de lElysée, 55 rue du faubourg Saint-Honoré 75008.
15 mai 2002
******
PREMIÈRES LETTRES
Adeline Challet, Paris, le 15 mai 2002.
Monsieur le Président de la République,
Le 5 mai dernier, lors du deuxième tour des élections présidentielles, nous avons été nombreux-ses à choisir de porter notre voix sur votre candidature. Dans le contexte de ces élections, face au risque que l'extrême droite représente pour la démocratie, les libertés, le respect des personnes et le progrès social, la citoyenne que je suis vous a fait confiance.
Aussi je m'étonne que le gouvernement dont vous avez souhaité vous entourer ne comporte ni ministre, ni secrétaire d'Etat chargée des droits des femmes. Comment comptez-vous promouvoir l'égalité des femmes et des hommes - je me réfère ici à votre programme - en l'absence d'une telle entité de décision? Ou bien pensez-vous qu'avec près de 20% de femmes dans ce gouvernement, le pouvoir est équitablement partagé? Ou peut-être n'est-ce là qu'une malheureuse coïncidence entre des choix politiques et une situation où prévaut la domination masculine ?
Depuis 1974, tous les gouvernements de la République française ont comporté une ministre ou une secrétaire d'État chargée des droits des femmes.
L'action menée doit être poursuivie, car il subsiste encore trop d'inégalités, d'injustices, de violences dont les femmes sont spécifiquement victimes. Nous vous demandons donc, avec le Collectif national des droits des femmes, de nommer au plus vite une ministre des Droits des femmes, disposant d'un budget
important.
Je vous adresse mes respectueuses salutations,
Adeline Challet.
Aurore Evain, 25 mai
Monsieur le Président de la République,
Depuis 1974, tous les gouvernements de la République française ont comporté une ministre ou une secrétaire d'État chargée des droits des femmes.
L'action menée doit être poursuivie, car il subsiste encore trop d'inégalités, d'injustices, de violences dont les femmes sont spécifiquement victimes. Nous vous demandons donc, avec le Collectif national des droits des femmes, de nommer au plus vite une ministre des Droits des femmes, disposant d'un budget important.
J'ajoute que seulement 22% de femmes sont présentes dans votre gouvernement. Qu'à la question "Sujet principal de votre message", il n'y a aucune proposition concernant la parité ou les rapports entre hommes et femmes qui sont pourtant les enjeux majeurs de la modernité et du siècle à venir dans l'évolution des mentalités et des sociétés.
Tout cela est bien regrettable et confirme malheureusement les craintes que j'avais avec votre élection (même si j'ai, bien sûr, voté pour vous). Vous n'avez pas été élu pour un mandat présidentiel mais pour une défense de la démocratie.
Alors, de grâce, ne nous décevez pas et prouvez que vous êtes également un président réceptif aux enjeux de la modernité et concerné par la juste représentation de tous les français et françaises ainsi que par le sort réservé aux rapports entre les sexes dans la cité qui constituent aussi le terreau éducatif de la jeunesse.
L'intérêt de la pensée du féminisme dans le domaine politique actuel vient du fait qu'elle permet de réfléchir sur le rapport de notre société à la différence (sociale, raciale...). Le féminisme pointe en effet notre relation à la différence première qui nous constitue, celle des sexes.
La façon dont l'être humain se construit à partir de cette différence, qui est la première qu'il expérimente dans son histoire individuelle, oriente ainsi la façon dont il va penser la différence en général au cours de sa vie. Les données du social et du politique vont également influencer cette vision et cette gestion de soi avec l'autre.
Voilà pourquoi tout cela n'est pas anodin et doit avoir une place visible dans la politique de votre gouvernement.
Je vous prie de recevoir, Monsieur le Président, l'expression de mes meilleures salutations.
Martine Herbin, 13 juin 02
Monsieur le Président de la République,
Vous avez été réélu et je vous en félicite. N'oubliez pas que ce vote massif en votre faveur comporte en majorité des femmes. Il serait dommage de les oublier maintenant que la victoire est là. Il me semble qu'avec la majorité que vous allez remporter au second tour des législatives, il serait mal venu et surtout indigne de la France en matière de respect des droits de l'Homme, de ne pas nommer une ministre des Droits des Femmes. En effet, depuis 1974, tous les gouvernements de la République Française ont comporté une ministre ou une secrétaire d'Etat chargée des droits des femmes.
Vous n'êtes pas sans savoir, et la vie de tous les jours nous en donne malheureusement les preuves criantes, qu'il subsiste encore trop d'inégalités, d'injustices de violences dont les femmes sont principalement les victimes.
Ne nous faites pas l'affront de votre indifférence, pour toutes ces femmes qui vous font confiance, ne les décevez pas et surtout n'alimentez pas la thèse simpliste que la droite réactionnaire et la gauche progressiste en terme d'égalités Femmes/Hommes.
Je vous remercie à l'avance de l'attention que vous aurez portée à mon courrier et vous prie de croire, Monsieur le Président de la République, à l'expression de mes sentiments respectueux."
C. E., 13 juin
Monsieur le Président de la République,
Depuis 1974, tous les gouvernements de la République française ont comporté une ministre ou une secrétaire d'État chargée des droits des femmes.
L'action menée doit être poursuivie, car il subsiste encore trop d'inégalités, d'injustices, de violences dont les femmes sont spécifiquement victimes.
En effet, ces actions engagées par le secrétariat des droits des femmes sont essentielles pour amener enfin quelques perspectives d'amélioration des relations entre hommes et femmes dans notre pays où la pornographie, la publicité sexiste et les médias prônent souvent un machisme et le mépris des femmes particulièrement dévastateur pour les jeunes générations.
Je vous demande donc, avec "Encore féministes !" le Collectif national des droits des femmes, et les Chiennes de garde, de nommer une ministre des Droits des femmes, disposant d'un budget important.
Espérant que notre demande sera entendue, je vous prie de recevoir, Monsieur le Président, mes salutations respectueuses
Katia Dieschbourg, 14 juin
Monsieur le Président de la République,
Depuis 1974, tous les gouvernements de la République française ont comporté une ministre ou une secrétaire d'État chargée des droits des femmes.
Le gouvernement dirigé par Jean-Pierre Raffarin depuis le 7 mai 2002 ne comporte ni ministre, ni même de secrétaire d'État aux droits des femmes.
Interrogé, le ministre des Affaires sociales, François Fillon, a déclaré le 19 mai que ces questions relevaient de son ministère. Cela ne donne aucune assurance, ni sur la pérennité et le financement des actions entreprises, ni sur le lancement de mesures pour remédier aux inégalités, aux injustices, aux violences dont les femmes sont spécifiquement victimes. Pire que cela, cette dilution des actions entreprises pour faire respecter les droits fondamentaux des femmes dans un service du ministère des Affaires sociales ne peut que conduire à une invisibilisation totale des discriminations et des violences machistes qu'elles subissent à tous les niveaux : symbolique, moral, économique et physique.
La composition du gouvernement au lendemain de votre réélection, ainsi que les choix opérés par l'UMP pour les législatives, est symptomatique d'un refus de la parité, d'un refus de voir des femmes accéder à des postes de pouvoir. 53% du corps électoral français doit donc se voir représentée presque exclusivement par des hommes, au mieux peu conscients du caractère spécifique des inégalités et des violences que subissent les femmes, au pire déterminés à maintenir le système de domination homme/femme à l'origine de ces inégalités et de ces violences.
Nous craignons que dans les moyens importants engagés pour lutter contre l'insécurité, ne figure aucun engagement financier en faveur de la protection et de la prise en charge des victimes de viols, et de violences conjugales (à 97% des femmes).
Nous craignons que la nomination d'un sympathisant des lobbies anti-IVG à la tête du ministère de la Santé entraîne le non respect dans les faits du droit des femmes à disposer de leur corps.
Les orientations du gouvernement dirigé par Jean-Pierre Raffarin, au bout d'un mois d'existence, semblent à notre grande inquiétude révéler une volonté de reléguer les femmes dans l'ombre et le silence, et de nier la nécessité d'oeuvrer pour préserver et de renforcer les conditions de leur accès à une vie digne et à un statut de citoyennes à part entière. L'action menée doit pourtant être poursuivie, car il subsiste trop d'inégalités, d'injustices, de violences dont les femmes sont spécifiquement victimes, et leur situation se dégrade de jour en jour. Nous vous demandons donc, avec le réseau "Encore féministes !" et le Collectif national des droits des femmes, de nommer une ministre des Droits des femmes, disposant d'un budget important.
Avec mes remerciements anticipés,
Bernadette SATOMURA-GILBERT, 14 juin
Monsieur le Président,
Nous sommes une tranche très importante de la population française qui n'a pas applaudi à votre élection, mais nous l'avons acceptée parce qu'elle nous prémunissait d'un danger grave et insidieux pour les principes démocratiques qui font l'essentiel des valeurs auxquelles nous tenons et pour lesquelles nous sommes prêts à des concessions. Mais la situation étant ce qu'elle est, pourquoi faut-il encore ajouter à cette tranche celle des femmes auxquelles on a retiré leur représentation en la personne d'un ministre ou d'un secrétaire d'Etat à leurs droits ? Il me semble pourtant que les mandats précédents n'ont pas résolu toutes les inégalités et injustices que subissent encore les femmes françaises, nous mettant au rang des records européens sur le sujet. Ou alors pensez-vous que la parité des mandats politiques peut résoudre ces problèmes par le miracle d'une mesure qui, somme toute, donne bonne conscience aux hommes qui font les lois.
J'ose croire qu'il s'agit d'une négligence que vous ne manquerez pas de réparer puisqu'il semble que vous soyez particulièrement sensible aux droits républicains et que ceux-ci sont tout autant du fait des femmes que des hommes.
J'espère de tout coeur, Monsieur le Président, que vous ne verrez pas, dans les interventions que vous ne manquerez pas de recevoir dans les jours qui viennent, de simples revendications d'un féminisme de barricade, mais que vous comprendrez les soucis de femmes de plus en plus nombreuses qui rejoignent le rang de courageuses vigilantes grâce auxquelles le sexisme restera un mal à combattre sans relâche pour que continue à émerger notre dignité et le respect de notre individualité humaine.
Je vous prie d'agréer, Monsieur le Président, l'expression de ma plus haute considération.
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VOTER CHIRAC
Et si Le Pen était élu le 5 mai ? Nous, féministes, nous devons voter Chirac et inciter notre entourage à le faire. Selon la formule frappante du réalisateur Marcel Bluwal le 28 avril au Zénith, « ne pas voter Chirac, cest plus quune faute, cest un crime contre la République ».
Même si nous le voyions le 21 avril comme un adversaire dans le cadre démocratique, nous devons voter Chirac le 5 mai, pour barrer la route à Le Pen, qui est un ennemi de la démocratie. Il ne s'agit pas seulement d'empêcher Le Pen de gagner, il faut aussi qu'il ait le moins de voix possible.
Il y aura dans les bureaux de vote des représentants du Front national. En ce jour où chaque voix comptera, il serait irresponsable de prendre le risque que notre vote soit annulé.
Pour que nous puissions nous reconnaître, je propose que nous allions voter à midi, vêtu-es de mauve, la couleur traditionnelle des féministes. Si vous navez pas de vêtement mauve, vous avez peut-être une écharpe ou un foulard. Ainsi, nous aurons peut-être loccasion de faire connaissance, aux abords du bureau de vote, avec des féministes de notre quartier et nous pourrons commencer à tisser des liens, pour nous préparer à agir ensemble.
ET CONTINUER À AGIR
Si Chirac est élu, les élections législatives auront lieu les 9 et 16 juin. Écrivons aux candidats au sujet des droits des femmes ! Par exemple, demandons-leur de se prononcer sur la loi antisexiste que nous sommes des dizaines de milliers de féministes à demander. Interrogeons-les sur le droit à lavortement, qui est très mal assuré en France ; sur la préservation des gynécologues médicaux, dont la profession aura disparu dans quinze ans ; sur la prostitution, question taboue chez les politiques.
Si Chirac est élu, nous serons soulagé-es après ces deux semaines intenses. Il ne faudrait pas que ce soit un lâche soulagement, ni que nous nous reposions trop longtemps. Le travail ne fait que commencer. Nous devons tisser des réseaux, participer davantage à la vie de la cité, développer le dialogue, y compris avec des personnes qui ont voté pour Le Pen. Nous devons faire comprendre que la démocratie est précieuse et que, partout où elle est menacée, les droits des femmes sont en danger.
Florence Montreynaud, 29 avril 2002